Lyanne laissa Hodent et Degala sous l’auvent. La nuit était maintenant noire. Le conteur habitait une hutte près de la haute cour. Etouble avait pour lui le respect qu’on doit à un compagnon de son père. Il ne pouvait le mettre dehors sans déshonorer la parole de son père, ancien seigneur de ce lieu.
Quand il approcha, il ne vit aucune lumière. On lui avait pourtant assuré de la présence du conteur en lui disant :
- Ce vieux fou de Nivyou, il ne bouge jamais.
La porte était branlante et ne résista pas quand il la poussa. C’était une cabane faite de branchages entrelacés dont les interstices avaient été comblés par de la boue. Dans un coin un feu de braises luisait doucement. Il repéra une silhouette assise à une table. L’homme leva la tête vers lui à son entrée. Il vit ses yeux blancs d’aveugle.
- Tu dois être cet étranger dont tout le monde parle, dit Nivyou d’une voix de basse bien timbrée.
- Tes oreilles sont exactes, conteur.
- Entre, si tu le peux.
- Ta parole est pour moi curieuse. Ta hutte est bien assez grande pour nous deux.
- Je te sens beaucoup plus grand que ce que tu montres.
- Tu es plus perspicace que beaucoup ici, conteur.
- Il y a bien longtemps que l’on ne m’a pas donné ce titre et voilà deux fois que tu l’emploies. J’ai plus souvent le droit à “vieux fou”.
- Ceux qui emploient de tels mots, que connaissent-ils de la sagesse ?
- Les bruits que j’ai entendus sont bien conformes à ce que je sens de ta présence. Il y a plus de puissance en toi que tout ce que contient cette ville. Que souhaites-tu, toi dont le savoir est déjà si grand ?
- Je désire entendre la légende des Gragons.
Nivyou partit d’un rire franc :
- Plus personne ne s’intéresse à cette légende. Les grands-êtres ont disparu depuis si longtemps que seuls restent ces récits.
- Pourtant, un gardien de troupeau a vu un être volant qui a attaqué un mibur. J’ai vu son ombre, elle est immense.
Nivyou se racla la gorge et garda le silence. Lyanne s’assit et attendit. Le temps passa. Dehors les activités s’arrêtaient les unes après les autres.
Nivyou murmura :
- Il y a une présence dehors.
- Je l’ai sentie, répondit Lyanne sur le même ton, il s’agit du jeune serviteur de la forge.
- Hum ! Ta présence l’attire.
- J’ai senti cela, conteur. Il est capable d’entendre la légende. Son esprit est vif et ouvert, beaucoup plus que beaucoup ici.
- Hi ! Hi ! Hi ! Ton jugement est bon. L’arrivée du seigneur Etouble a beaucoup fait pour les soldats et très peu pour les conteurs. Les Gragons… Les Gragons… Sais-tu déjà ce qu’étaient les Gragons ?
- J’attends tes paroles.
- Il y a bien longtemps. Les pères des pères de nos pères avaient déjà oublié la plus grande partie du savoir sur les Gragons quand le maître conteur de l'époque inventa cette légende, fixant ainsi le savoir des hommes. Il parlait de temps que les hommes ne savent pas compter. Le ciel était aux Gragons. Le passage d'un de ces grands êtres était une bénédiction. Chaque ville, chaque village gardait un enclos avec quelques bêtes pour les satisfaire. Leur appétit était légendaire. Ils étaient les protecteurs. Des monstres ravageaient la terre, tout en crocs et en carapace, ils ne craignaient pas les pauvres efforts des hommes. Le souffle de feu des Gragons était le seul rempart contre ces porteurs de mort. Malheureusement, leur nombre ne suffisait pas à combattre tous ces monstres. Des mages avaient réussi à se lier avec certains Gragons. Leurs services étaient fort chers, mais quand vos récoltes sont dévastées et que menace la famine, vous êtes prêts à beaucoup de sacrifices. C'est ainsi que vivait la caste des mages. Parfois, la chance souriait à un village. Un Gragon solitaire passant par là, nettoyait le pays de cette vermine immonde. La légende commence dans un village isolé, là-bas près de la mer. Venait de naître un enfant quand le guetteur hurla son cri. Tous les hommes se ruèrent sur leurs outils les plus tranchants. Certains firent des torches. Le tarasque arrivait. C'était une bête énorme. Courageusement les hommes attaquèrent qui avec sa fourche, qui avec sa torche. Pendant ce temps, les femmes aussi rapidement qu'elles purent, rassemblèrent des affaires et des provisions pour fuir dans les grottes de la falaise. Le tarasque affamé, avait entamé le combat. Ses pattes aux griffes puissantes, firent plus d'un mort. Il balaya les porteurs de torches comme on renverse les quilles dans un jeu. Quand presque tous les hommes furent à terre, les survivants fuirent aussi vite qu'ils le pouvaient, essayant d'entraîner le monstre loin de leurs maisons et de leurs maigres biens. Mais le tarasque avait faim. Délaissant les fuyards, il dévora les corps à terre, éventrant, déchirant de tous ses crocs les agonisants. De l'autre côté de la palissade, ce fut la panique. Les femmes retardataires, laissèrent tout tomber pour se mettre à l'abri. La jeune accouchée n'eut pas la force de s'enfuir. Épuisée par la difficulté de ce premier accouchement qui avait commencé le jour précédent, elle avait sombré dans un sommeil qui confinait au coma. Le bébé, petit être au teint sombre, vagissait dans son berceau ignorant des évènements qui se passaient autour de lui. Le tarasque affamé, leva son mufle pour prendre le vent. La nourriture n'était pas loin, il la sentait. La palissade, que les villageois avaient eu tant de peine à monter, s'effondra comme un fétu de paille. Le monstre poussa un glapissement rauque de satisfaction quand ce dernier obstacle céda. A chacun de ses mouvements, il détruisait quelque chose. Quand il ne le faisait pas par maladresse, il effondrait une hutte ou une maison pour la fouiller à la recherche de quelque chose à manger. Il détruisit la moitié du village avant qu'il ne renifle l'odeur de la viande fraîche. Le toit voisin ne résista pas. Il fouilla avec application les décombres sans trouver ce qu'il cherchait. Pourtant l'odeur n'était pas loin. Il bondit au milieu des débris qu'il avait lui-même faits, grattant frénétiquement le sol à la recherche de nourriture. Tout le monde sait que la seule obsession des tarasques était de se nourrir. De loin, les hommes le virent déblayer tout en grognant et hurlant de frustration. L'odeur était là et il ne pouvait l'avoir. Ils entendirent le cris de victoire du monstre quand il vit le mibur s'échapper de sa cachette. L'animal n'avait pas fait vingt pas que le grand tarasque lui sautait dessus pour le dévorer. Dans les bois, plus loin, le chaman tentait d'influencer les esprits pour sauver ce qui restait du village. Ses litanies étaient couvertes par les cris du monstre toujours affamé qui était reparti sur une nouvelle piste. Il égorgea les quelques bêtes que les villageoises n'avaient pas réussi à emmener avec elles dans les grottes de la falaise surplombant la mer. Brusquement, le tarasque s'immobilisa. Dans le silence revenu, on entendit distinctement les pleurs d'un bébé. Cela rendit le tarasque comme fou. Laissant les carcasses à demi-dévorées, il se précipita vers l'origine des cris, arrachant tout sur son passage. Arrivé près d'un morceau de palissade resté debout, il s'arrêta un instant pour écouter à nouveau. Et il bondit sur la hutte encore debout, l'éventrant à grands coups de patte, envoyant voler des débris en tous sens. Dans le bois, un homme tomba à genoux en pleurant. Un des présents s'approcha en lui mettant la main sur l'épaule. Tout le monde avait compris. La mère et l'enfant, ce premier fils tant attendu, étaient perdus. Le tarasque hurla sa victoire et plongea son mufle dans la cabane. Il en ressortit avec un corps qu'il avala en quelques bouchées. Il allait replonger dans les débris pour saisir le nourrisson quand surgit un Gragon. C'était un grand Gragon femelle, au ventre rond des porteuses d’œufs. Elle souffla son souffle ardent sur le dos du tarasque qui hurla. Il se dressa sur ses pattes arrières essayant de saisir le Gragon sans y réussir. Quand il vit le grand être virer sur l'aile et revenir, le monstre battit en retraite. Il hurla à nouveau en accélérant quand la langue de feu lui atteignit le dos. Le Gragon continua sa chasse, poursuivant le tarasque qui freinant brutalement, échappa à la fin de l'attaque. Il fit demi-tour repartant vers le village, provoquant des cris de désespoir chez les hommes à l'orée du bois. Le Gragon reprit sa poursuite, arrivant sur les talons du tarasque en rase-motte. Si les flammes firent encore accélérer l'immonde bête, elles enflammèrent les débris des maisons. Le tarasque freina de toute la force de ses six pattes quand il arriva au bord de la falaise. N'ayant pas d'autre choix, il fit volte-face et se dressa sur ses pattes arrières. Le Gragon lancé à pleine vitesse, ne put l'éviter. Le choc vu de loin, sembla se dérouler au ralenti. Le tarasque bascula en arrière et le Gragon se retrouva à terre, comme étourdi. La terre trembla quand la lourde bête heurta les rochers en bas de la falaise. Son hurlement fut étouffé par les vagues qui le réduisirent au silence. Le Gragon accroché de toutes ses griffes au bord de la falaise, poussa un cri, puis se laissa tomber dans un vol plané. Les hommes dans le bois, virent partir la femelle Gragon.
- Elle doit être pressée d'aller pondre vu le ventre qu'elle a, dit l'un d'eux.
Ils n'attendirent pas la réponse. Tous se mirent à courir pour revenir au village sauver ce qui pouvait l'être.
En arrivant, ils constatèrent, toutes les huttes étaient détruites sauf quelques unes plus près du bord de la falaise. Fman qui avait vu sa femme se faire dévorer, se mit frénétiquement à fouiller les décombres de sa maison, guidé par les pleurs de l'enfant qui maintenant hurlait de faim. Si quelques hommes étaient avec lui, les autres étaient partis vers les refuges. Ainsi s'appelait le réseau de grottes dans la falaise. On y accédait par un étroit chemin qu'aucun tarasque ne pouvait suivre et l'ouverture même des grottes, juste assez grande pour un mibur, constituait une protection efficace. Ils allèrent prévenir les femmes qui remontèrent vers le village. Ce fut à ce moment-là que Lmon découvrit une grosse boule brune. Comme elle était là où s'était posé le Gragon, tout le monde en conclut que c'était un œuf de Gragon.
Tout le monde fut d’accord pour dire qu’on ne jouait pas avec un oeuf de Gragon. Il fut recueilli et déposé dans une niche creusée à même le rocher. Les gens du village, le chaman en tête, espéraient que si un Gragon naissait, ce serait leur Gragon et qu’il les protégerait contre tous les tarasques…
Les premiers jours, tout le monde vint le voir, le toucher, le sentir. Comme rien ne se passait et que le village avait besoin de bras, on le laissa là. Le rocher creux marquait l’entrée du chemin menant aux grottes refuges. Personne n’aimait y aller sauf en cas d’alerte. Quant au fils de Fman, il commença sa vie en étant mis en nourrice chez la femme de Lmon qui avait perdu son bébé de fièvre un peu avant l’attaque. Une saison passa. Le soleil fut généreux et les récoltes poussèrent bien. Les voisins d’autres villages restèrent sur leurs terres. Personne n’essaya de savoir pourquoi. Cette année-là, il n’y eut pas de razzia. Pour un étranger, le village avait repris un aspect normal. Seuls les villageois voyaient encore çà et là les traces du passage du monstre. Les huttes étaient moins nombreuses qu’avant. Le fils de Fman fut présenté. On le tint au-dessus du vide en demandant s’il était de la race des hommes ou de celle des esprits. Fman vint. Tout orné de feuilles et de branches, il réclama cet enfant comme étant un petit homme, fils d’un homme. On lui donna le nom de Nmin. Maintenant qu’il était sevré, il allait et venait dans le village. Quand il découvrit l’oeuf avec les autres garnements, ils ne comprirent pas ce que cela représentait. Ils avaient entendu parler de tarasques et de Gragons, mais n’ayant jamais vu ni l’un ni l’autre, ils en ignoraient la forme. Pour eux ce ne fut qu’une balle qu’ils emmenèrent dans la première salle sous la falaise pour jouer entre eux. Ils se lassèrent vite. Trop lourde et peu capable de rebondir, ils la laissèrent dans un coin près de la muraille sans plus s’en occuper. C’est là, après leur départ, un soir, que se déchira la membrane de l’oeuf. Le Gragon qui en sortit était tout petit et tout gris. Dès qu’il put, il se réfugia dans une niche creusée dans la paroi. C’est là que Nmin le découvrit. Il le prit tout d’abord pour une statue, en s’étonnant de ne pas l’avoir remarquée plus tôt. C’est en voulant la saisir qu’il comprit son erreur. La gueule du Gragon se referma sur sa main. Nmin hurla, le Gragon piailla, relâchant son étreinte, et tenta de s’envoler pitoyablement vers un abri. Nmin se tenant la main, fut prit de pitié pour ce drôle d’oiseau gris qui semblait si maladroit. Il pensa qu’il pourrait peut-être l’apprivoiser ce qui le ferait passer pour un héros aux yeux des autres qui le traitaient toujours de bébé. Restait à le faire. Nmin du haut de sa première saison, chercha comment il pouvait faire pour l’apprivoiser. Une idée lui vint.
- Bouge pas, Bestiole… Bouge pas, je reviens.
Le Gragon pencha la tête en l'écoutant comme s'il l'avait compris et se renfonça tout au fond de cette niche refuge.
Nmin courut chercher de la nourriture. Il se posa la question de ce que pouvait manger un tel oiseau. Il ne ressemblait pas aux piafs que son père ramenait parfois, petites boules de plumes colorées. Ce devait être une sorte d’oiseau des cavernes, tout gris et sans plume. Il fouilla dans les déchets de ce qui avait été mangé, n’osant pas prendre dans les provisions.
Il ramena des ossements sur lesquels restait de la viande, trop cuite d’ailleurs et divers autres rogatons dont sembla se régaler son drôle d’oiseau. Une fois rassasié, l’oiseau tendit le cou vers Nmin. Celui-ci un peu impressionné, tenant sa main mordue à l’abri, le laissa s’approcher. L’animal émit une sorte de grondement sourd et posa sa tête sur l’épaule de Nmin. Il le laissa faire et de sa main valide, il caressa le cou de l’oiseau. Il était doux. L’animal gronda plus fort, fermant les yeux, semblant apprécier ce qui se passait. Ils restèrent ainsi un moment. Nmin était content. Cet ami-là, personne ne pourrait lui enlever. Leur amitié se renforça au fur et à mesure qu’il lui amenait à manger. Le temps passa. Nmin fut confronté à une question. Comment l’appeler ? Il voyait bien que ce drôle d’oiseau, qui maintenant se nourrissait tout seul la nuit, avait une envergure importante. Le nom devait être en rapport. C’est en arrivant un matin que l’idée lui vint. Il venait de se faire mettre à mal par les autres enfants, encore une fois. Petit en taille et en carrure, il était régulièrement le souffre-douleur de la bande d’enfants qui parcourait le village. Son seul refuge était ces grottes. Les autres n’osaient pas s’y aventurer. On y entendait des bruits et on voyait des ombres plus qu’inquiétantes. Quand il se sauvait, poursuivi par l’un ou l’autre, il se réfugiait ici. Les autres n’osaient pas le suivre dans ces couloirs trop sombres où devaient régner les mauvais esprits. La notion de vengeance lui vint à l’esprit. Cet oiseau, par sa seule présence, serait sa vengeance. Il l’appela Mossaro, du nom de celui qui est désigné pour aller porter la vengeance entre les villages.
Quand arriva la saison du vent du large, celle qui amène la pluie et les tempêtes, Nmin n’avait toujours pas réussi à convaincre Mossaro de sortir au grand jour. Un jour qu’il était encore plus triste que d’habitude, Nmin posa sa tête contre celle de Mossaro. Les grands yeux allongés maintenant entourés de fines écailles brillaient comme du métal jaune. Il fut comme happé par ce regard.
- “Manger ! Manger du vivant !”
Nmin se recula vivement. Quelle était cette voix ? Il regarda tout autour de lui mais il était seul, seul avec son animal. Il le regarda curieusement.
- Tu parles ?
Seul le silence lui répondit. Mossaro approcha la tête de Nmin. Elle était maintenant presque aussi grosse que son torse. Il pensa : “encore un peu et il n’entrera plus ici !”
- “ Non, il me faudra un autre lieu !”
De nouveau, il sursauta. Il n’avait pas rêvé. Mossaro ne parlait pas mais s’adressait quand même à lui. Il le regarda dans les yeux :
- Je vais te chercher cela. Il y a, pas très loin, une petite rivière qui coule jusqu’à la mer. J’ai vu un grand trou assez haut. J’irai voir si cela peut te convenir.
Mossaro répondit par ce grondement sourd qu’il faisait quand il était heureux.
Nmin savait qu'il allait se faire disputer, mais il avait promis à Mossaro d'aller voir. Les adultes étaient déjà tous rentrés à l'abri. la tempête arrivait. Le vent soufflait déjà fort et la pluie cinglait la région. Dans la combe, Nmin était encore relativement à l'abri. Il tentait de se hisser vers la cavité qu'il avait repérée. La végétation assez dense de la pente, l'aidait. Il ne lui restait que peu de temps pour gagner un abri. Avant la fin de la journée, le hurlement du vent couvrirait tous les bruits et malheur à ce qui n'avait pas été attaché. Quand il arriva juste en dessous de l'entrée, il jura. Il y avait là une marche de pierre trop grande pour lui. Il se déplaça avec précaution vers le chemin qui lui sembla le moins difficile. Quelques vagues racines lui permirent de s'accrocher. Il se félicitait de ne pas être trop lourd. Il était agrippé à une liane qui lui offrait une bonne chance de passer l'obstacle quand un brusque coup de vent le prit violemment par en-dessous. Il se cramponna de toutes ses forces et ferma les yeux. Il se sentit soulevé, emporté. La liane se tendit, l'obligeant à resserrer sa prise. Il hurla de peur tout en sachant que personne ne serait là pour l'entendre. Il se sentait comme un drapeau secoué par le vent. Brutalement, alors que la pluie l'avait détrempé, il sentit la rupture de la liane. Il resta comme suspendu un court instant et heurta brutalement quelque chose de dur. Il perdit conscience.
Quand il revint à lui, il avait chaud. Il était confortablement installé sur un lit de mousse. Un doux grondement le berçait. Nmin ouvrit les yeux. Mossaro était là, lové autour de lui. Il ne l'avait jamais vu aussi grand. Il avait cessé d'être gris. Sa peau s'était couverte de sorte d'écailles comme les poissons, aussi brillantes que les poissons. Il avait déjà vu cela une fois, c'est quand Flin, le chef du village, avait montré sa puissance en sortant un couteau qui avait la même brillance. Il était bien, il se rendormit.
Il faisait grand jour quand il se réveilla. Mossaro n’était pas là. Il se leva pour aller jusqu’au bord de la caverne. Il recula devant le vide. Il se demanda comment il avait pu monter sur cette corniche. Il se rappela vaguement la liane. Maintenant se posait la question de sa descente. Son père devait être fou d’inquiétude sans parler de la femme de Lmon qui l’avait nourri. Il appela :
- Mossaro ! Mossaro !
Sa voix semblait trop faible dans ce vent qui soufflait encore. Une ombre lui cacha la lumière, lui faisant peur. Il se recula dans la partie la plus sombre de la grotte. Ce fut juste assez rapide pour permettre à Mossaro d’atterrir. Immédiatement, ouvrant sa large gueule, il fit tomber des poissons devant Nmin. Ce fut à ce moment-là qu’il s’aperçut combien il avait faim. Il rassembla de la mousse et quelques branchages. Il avait déjà vu son père faire du feu. On frottait du bois contre du bois en tournant très vite et cela prenait. Il tenta une fois, deux fois sans succès. Cela lui donna envie de pleurer. Mossaro lui donna des petits coups de museau comme s’il voulait que Nmin se pousse. Fatigué par son effort pour enflammer ce qu’il avait préparé, il se laissa faire. Avec de petits cris, Mossaro approcha son museau du tas de brindilles et doucement fit jaillir de sa gueule ce que Nmin n’aurait jamais osé espérer. Mossaro était un oiseau cracheur de feu. Nmin comprit alors son erreur. Les seuls êtres capables de cracher du feu étaient les Gragons. Mossaro n’était pas un drôle d’oiseau nocturne, Mossaro était un Gragon et son ami. L’émotion lui serra la gorge. Nmin se jeta au cou du Gragon qui, surpris, fit en bond en arrière et bascula dans le vide. Nmin, entraîné par le mouvement, s’accrocha de toutes ses forces. D’un mouvement fluide et puissant, Mossaro avait déployé ses ailes et fait un demi-tour pour que Nmin se retrouve sur son dos, à la racine du cou. Le grand être se laissa glisser sur le vent qui le portait, emmenant Nmin qui n’en croyait pas ses yeux. Ils volaient…
- « Tu aimes, Nmin ? »
Les paroles s’inscrivirent dans sa tête comme s’il les avaient entendues.
- J’ADORE, hurla-t-il pour couvrir le bruit du vent.
- « Tu n’as pas besoin de hurler comme cela, je t’entends où que tu sois ! »
Au-dessus de la mer, Mossaro lui fit découvrir tout ce qu’il savait faire en vol, éclatant de rire chaque fois qu’il surprenait Nmin. Au bout d’un moment, il se mit à voler un peu au-dessus de la surface de la mer.
- « Tu vois, là-bas, le trait blanc ? »
- Oui, je le vois.
- « C’est ton village. On y va ? »
- OUIIII !
Mossaro reprit ses puissants battements d’ailes et prit de la vitesse. Nmin avait trouvé un endroit à l’abri du vent derrière une écaille presque transparente, comme si l’endroit avait été fait pour lui.
- « Tu penses bien, Nmin. Tu es moi et je suis toi. Alors quand un Gragon se lie à un humain, cet endroit se crée pour l’accueillir. »
Nmin se mit à rire de bonheur. Jamais, il n’avait pensé pouvoir être aussi heureux.
La vitesse de Mossaro devint prodigieuse. Les falaises si lointaines il y a un instant, devinrent un mur grandissant à toute vitesse. Nmin eut presque peur, mais Mossaro savait, cela ne pouvait être autrement. Cambrant ses ailes il fit une chandelle qui lui fit raser la paroi de roches blanches. Telle la plus rapide des flèches, ils surgirent du gouffre, effrayant les humains qui vaquaient à leurs occupations. Il y eut des cris :
- Un Gragon ! UN GRAGON !
Mossaro fit un tour du village à basse altitude en regardant les humains s’agiter en-dessous. Nmin lui dit :
- Je ne vois rien !
- « Ferme les yeux, Nmin et regarde ! »
Étonné, il fit ce que lui commandait Mossaro. Il poussa un nouveau cri de surprise. Il voyait ce que voyait Mossaro. C’était extraordinaire. Il voyait tout l’ensemble du village et en même temps, il pouvait détailler le moindre recoin. Il vit son père, la main au-dessus des yeux, qu’il avait plissés, regarder le Gragon volant. Il vit Lmon sortir de sa hutte suivi de sa femme. Il vit même Flin, le couteau à la main et le chaman qui s’était arrêté en pleine cérémonie d’offrande au totem du village.
- « On se pose ? »
- On se pose !
Il y eut des mouvements de panique quand le Gragon, arrivant à grande vitesse, bloqua son mouvement d'une brusque cambrure des ailes pour se poser sur la place du village.
Puis ce furent des cris de joie. Un Gragon dans le village était signe de bénédiction. Pourtant personne n’osait approcher. Nmin se dégagea de sa place et apparut sur le dos du Gragon. Il y eut de nouveaux cris, à commencer par son père et sa nourrice. Nmin se rengorgea en voyant les regards plus qu’envieux que lui jetèrent les autres enfants. Il descendit de son perchoir pour être accueilli par le chef du village et le chaman. Celui-ci, revêtu de son habit de cérémonie, s’approcha en faisant force courbettes devant le Gragon.
- « Il est curieux ce petit homme »...
Nmin n’osa pas lui répondre directement. Il émit juste la pensée que c’était le chaman et que ce dernier était un grand sorcier plein de pouvoirs qui pouvait donner la vie ou la mort. Cela fit rire Mossaro.
- « Est-il aussi puissant que tu le dis ? J’ai vu dans l’esprit des gens qu’il n’avait rien fait contre le tarasque. »
Nmin se renfrogna.
- Les tarasques sont des monstres pleins de malice. Que peut un homme contre eux ?
Il avait parlé tout fort. Les gens autour ne comprirent pas tout de suite à qui il s’adressait et puis la compréhension se fit dans leur esprit. Leur regard sur Nmin changea à nouveau. Il parlait aux Gragons. Il était donc plus fort que le chaman. Est-ce qu’il allait garder le Gragon dans le village ? Certains pensaient que plus jamais ils ne risqueraient de se trouver aux prises avec un tarasque, pendant que d’autres pensaient au coût de l’entretien d’un Gragon.
- C’est que ça mange, ces bêtes-là, murmura une femme à sa voisine. Si on doit le nourrir tout le temps, on va mourir de faim avant peu.
Nmin était perturbé par tout ce flot de pensées que Mossaro lui transmettait. Sans ouvrir la bouche, il dit :
- « Tu entends vraiment tout ça ? »
- « Oui, et d’autres choses qu’ils ne savent même pas qu’ils pensent. »
La gêne s’installa. Qu’allait-on faire ? Comment se conduit-on avec un Gragon ? Et puis Nmin, qu’allait-il devenir ?
Flin prit la parole après s’être concerté avec le chaman.
- Nous allons faire une grande fête. Les villages voisins viendront. Nous leur montrerons que nous avons un Gragon, parce que bien sûr, Nmin sera notre relais auprès du Gragon…
- « Je crois qu’il n’a rien compris », pensa Mossaro.
- « Mais c’est le chef », lui répondit Nmin.
- « Et cela ne l’autorise pas à faire ce qu’il dit. »
- « Tu ne serais pas content de pouvoir manger ? »
- « Effectivement, s’il y a un banquet ».
Pendant leur échange, Flin avait continué son discours. Nmin n’avait pas écouté, mais la fin parlait des étapes de l’organisation. Les taches furent distribuées et bientôt, les uns après les autres, les villageois partirent faire ce qu’il y avait à faire. Cela se fit d’autant plus vite que la pluie s’était remise à tomber.
- « On devrait rentrer à la grotte », dit Mossaro.
Nmin approuva. Il ne savait pas vraiment à quoi il s’attendait en atterrissant là, mais il repartait insatisfait. Il ne se sentait pas intérieurement en paix. Le vol de retour vers la grotte le détendit. Sur le dos de Mossaro, il oubliait tout, se laissant aller au plaisir
Quelques jours plus tard, alors que de voir le Gragon devenait une routine pour le village, revint un porteur de message. Il arrivait du village situé à une journée de chez eux. L’homme avait une mine sombre. Quand il s’approcha de Flin pour délivrer son message, tout le monde avait compris… Un tarasque était signalé. Cela leur rappela de mauvais souvenirs. Le monstre qui avait presque détruit le village, venait déjà de ce village. Les avis furent partagés. Certains pensaient qu’on ne risquait rien avec un Gragon dans le village, d’autres le trouvaient trop petit et trop jeune pour venir à bout de la bête décrite par le messager.
Mossaro se promenait quelque part. Nmin avait repris ses activités normales. Les travaux n’attendaient pas. La saison des pluies permettait que poussent les récoltes. Il fallait lutter contre les nuisibles, qu’ils soient animaux ou végétaux. Il fallait beaucoup de temps pour faire cela. Quand il avait vu le Gragon, le père de Nmin avait décidé de défricher un peu plus pour avoir un champ de plus. C’était un pari sur l’avenir. Fman prenait le pari qu’aucun tarasque ne viendrait détruire les récoltes et manger les animaux. En apprenant ce qui se passait à Gianthad, il douta. Le messager parlait d’un monstre plus gros que celui des saisons passées. Ses pensées influençaient Nmin qui ne savait plus ce qu’il devait croire. Il avait posé la question à Mossaro à son retour qui avait répondu de manière énigmatique :
- « Quand un tarasque est gros, le Gragon est gros ».
Pour Mossaro, c’était tellement évident qu’il ne voyait pas ce qu’il devait expliquer.
- « Viens », dit-il alors à Nmin. « On va aller à Gianthad. Ce n’est pas très loin. »
Pour Nmin qui pensait comme un piéton, la proposition de Mossaro lui semblait irréaliste. Pensant qu’il allait voler et échapper aux corvées, il acquiesça tout de suite. Il se retrouva bientôt à sa place sur le dos du Gragon. A chaque fois, c’était la même joie, la même découverte, le même plaisir. Il ne leur fallut pas longtemps pour rejoindre Gianthad. Cela étonnait toujours Nmin. Il découvrit le village de haut. Bientôt, il repéra le tarasque. Gianthad était un bourg beaucoup plus grand que leur village. Les troupeaux y étaient nombreux. C’est sur l’un deux que s’acharnait la bête, décapitant les mibur aussi facilement qu’on fait tomber un fruit mûr. Bloqué par les haies d’épineux, le troupeau ne pouvait que tourner en rond sans pouvoir s’échapper. Dans les autres parcelles, des hommes, tout en restant le plus discret possible, tentaient de sauver ce qui pouvait l’être. Nmin sentit sa colère monter comme celle de Mossaro. Ces monstres méritaient la mort. Leurs victimes criaient vengeance. Si Nmin en était convaincu, il ne voyait pas comment son petit Gragon allait attaquer une bête plus grosse que lui.
Mossaro fit un survol du champ. Le tarasque tout occupé à dévorer ses proies, ne fit pas attention à ce qui se passait au-dessus de lui. Mossaro prit de la hauteur. Nmin vit le sol s'éloigner à toute vitesse. Tout rapetissait rapidement. Même s'il n'avait pas beaucoup volé, le phénomène lui sembla étrange. C'est comme si... Il décrocha du regard de Mossaro pour regarder autour de lui. Il poussa un cri de surprise.
- « Tu ne savais pas, Nmin ? Les Gragons peuvent choisir leur taille. »
Mossaro à cette taille, n'aurait pas tenu dans la grotte de la falaise. Il était maintenant plus gros que le tarasque. Il vira et se mit en piqué. Nmin qui ne voulait rien perdre de la confrontation, fondit son regard dans celui du Gragon. L'instinct du tarasque avait dû l'avertir, car lâchant le mibur qu'il dévorait, il tourna la tête en tous sens. Il n'eut pas le temps d'éviter l'attaque de Mossaro. Les flammes lui léchèrent le dos. Nmin fut impressionné par la taille qu’avait prise le Gragon. Il était maintenant deux fois plus grand que le monstre qui, sur ses pattes, était haut comme deux hommes. Le tarasque hurla et tenta de fuir. Il fut ralenti par la haie. Plus que les longues épines, ce fut la dureté des troncs qui le bloqua un temps. Mossaro en profita pour revenir à la charge. Le monstre se battait encore avec les branches qui l'entravaient quand les griffes du Gragon lui labourèrent le dos. Son cri fut entendu jusqu'à Gianthad. Le sang toxique de la bête se répandit sur le sol y créant de vastes taches brûlées. Mossaro de nouveau piqua, crachant son feu sur le tarasque qui, après s'être libéré des arbustes, galopait pour échapper à la chaleur. Quand le Gragon passa au-dessus du monstre, celui-ci fit un prodigieux bond en l'air de toute la puissance de ses six pattes. Nmin entendit claquer la monstrueuse mâchoire à quelques coudées de son abri. Le combat continua ainsi. Mossaro avait l'avantage. Le tarasque devait se protéger du feu, en particulier, il devait fermer les yeux, ce qui donnait un avantage certain au Gragon. Nmin vivait cela aussi intensément que Mossaro. Quand arriva l'hallali une foule s’était rassemblée pour voir les derniers moments de la bête honnie. Quand se furent apaisés les derniers soubresauts du tarasque, ce fut une explosion de joie. Quand Nmin descendit du dos de Mossaro, l'ovation fut tellement gigantesque qu'il ne l'oublia jamais. La fête fut à la hauteur de l'événement. Bientôt dans la région, on ne parla plus que du Gragon de Nmin. Certains même espéraient que leur seule présence suffirait à éloigner les tarasques. Mais si la bête est puissante, elle ne raisonne pas, elle ne sait que chasser.
Ils étaient encore à être fêtés quand arriva un homme qui se présenta à Nmin :
- Mon Maître est prêt à payer cher pour que vous le débarrassiez du tarasque qui hante ses terres. Il vous sera éternellement reconnaissant de faire cela pour lui.
Nmin qui entretenait maintenant une relation mentale continue avec Mossaro, n'eut même pas besoin de lui demander.
- « Si c'est pour revivre ce qu'on vient de vivre, alors je suis partant ! »
C'est ainsi qu'ils repartirent à la chasse au tarasque. C'était une femelle. Le combat fut plus difficile, mais Mossaro en vint à bout. C'est au moment de l'hallali que Nmin repéra par les yeux de Mossaro les petits. Ils comprirent alors pourquoi, elle n'avait pas changé de lieu comme les autres monstres. Ses petits l'avaient bloquée dans ce territoire. Il y en avait deux qui avaient déjà la taille d'un grand humain. Si l'un se traînait et fut rapide à éliminer, l'autre opposa une résistance farouche comme un grand.
De nouveau, ils furent fêtés comme des sauveurs, mais cela ne dura pas. De nouveau, on vint implorer leur aide pour une nouvelle éradication. Ce fut ainsi pendant des lunes et des lunes jusqu'à ce qu'un jour, ce soit le roi qui demande leur aide. Mossaro en fut ravi :
- « On va pouvoir lui demander de l'or ! »
L’œil de Mossaro en était devenu brillant de désir. Nmin sourit à l'idée de voir le roi et surtout d'avoir de l'or.
Quand le Gragon se présenta en vol près de la capitale, ce fut comme un signal pour une fête malgré la situation. La ville était quasiment en état de siège avec plusieurs tarasques tournant autour. Les troupes avaient tenté d'éliminer les monstres, mais ils avaient subi de très fortes pertes sans pouvoir en éliminer un. Ils avaient blessé une des bêtes sans autre résultat que la colère des tarasques qui étaient venus attaquer les remparts. Les hauts murs bloquaient le passage des monstres. Si ceux-ci tentaient de monter, des meurtrières permettaient de les repousser avec des baliveaux qui, malheureusement, ne résistaient pas aux violents coups de pattes. Alors que Mossaro se posait, on entendit les cris des tarasques qui, eux aussi, l'avaient repéré.
Le roi avait bien fait les choses. Mossaro et Nmin furent accueillis comme personne ne les avait jamais accueillis. On leur donna de l’or, et de bonnes choses à manger. Mossaro prit l’or dans sa gueule quand Nmin s'empiffrait de sucreries. On les conduisit jusqu’au palais avec force ovations. C’est assez grisés, qu’ils arrivèrent devant le roi. Nmin fut décontenancé par la prestance du personnage. Il se sentit subitement insignifiant. Quand le roi s’adressa à lui, Nmin n’eut plus qu’une envie, l’aider. Mossaro fut conduit dans les jardins où une grotte artificielle avait été dressée. C’est là qu’il creusa la terre pour enterrer ce qui était son trésor. On lui avait amené un beau mibur à croquer. C’est là qu’ils se retrouvèrent pour dormir après le banquet donné pour Nmin, le chevaucheur de Gragon. On entendait encore les bruits de la fête qui continuait dans les jardins en contrebas de la grotte de Mossaro. Nmin trouva le Gragon lové sur la terre fraîchement remuée recouvrant son or.
- Tu entends la fête ?
- « Oui, ils font beaucoup de bruit. »
- Le roi est vraiment un homme extraordinaire...
- « Te voilà bien enthousiaste ! Pendant que tu bois et que tu manges, j'ai été voir... »
- J'croyais qu't'avais pas bougé !
- « Tu es plein de vin ! »
- Ouais !
- « Alors, écoute bien ! Pendant que tu faisais la fête, j'ai fait un tour en ville. J'avais pris la taille d'un de leurs petits oiseaux. Dans cette ville, il n'y a qu'ici qu'on mange à sa faim. Les tarasques n'arrêtent pas d'attaquer. C'est une horde complète qui est dehors. »
- Et alors, on va les réduire les cendres !
- « Tu ne comprends pas ! C'est la première fois qu'on va se retrouver face à une horde qui sait chasser en groupe. »
Mossaro coupa court à la conversation. Nmin était trop saoul pour voir le danger.
Il le réveilla avant l'aube. S'il rechigna, Nmin se leva quand même et accepta l'idée que lui exposa le Gragon, même s'il la trouva curieuse. Ils déambulèrent tous les deux dans la ville. Nmin portant sur son épaule Mossaro qui avait prit la plus petite taille qu'il pouvait. La réalité le toucha de plein fouet. La ville était en siège, le rationnement existait bel et bien, et les cris des tarasques attaquant sans cesse couvraient les quelques bruits de la vie courante.
- « Vois pourquoi le roi a appelé ! »
Toujours sous le charme de la soirée d'hier, Nmin fut renforcé dans son idée d'aller les griller tout de suite. Mossaro lui répondit :
- « Bien sûr qu'on va y aller, mais un roi qui fait la fête pendant que ses sujets meurent de faim, est-ce un bon roi ? »
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