Son retour en ville avait réjoui le
cœur des habitants. Le roi-dragon s'était entretenu longuement avec
Quiloma sur ce qu'il convenait de faire. Les gens de Tichcou avaient
des vivres et allaient les partager. Pouvait-on leur faire
suffisamment confiance ? Le roi-dragon ne le croyait pas. Il
voulait un contrôle. Il avait proposé à Quiloma de prendre le
commandement des deux villes. Ce dernier avait accepté mais avait
refusé de descendre à Tichcou.
- Il n'est pas bon que l'ennemi d'hier
commande aujourd'hui. Il serait préférable d'envoyer quelqu'un issu
d'ici, avait-il déclaré.
L'idée avait plu au roi-dragon. Ils
s'étaient arrêtés sur le nom de Sstanch qui avait montré sa
valeur dans les évènements passés. C'est ainsi qu'une
demi-phalange était partie vers Tichcou. Ce n'étaient que des
guerriers du cru. Le détachement n'était composé que d'hommes nés
dans la ville. Les guerriers blancs restaient sous les ordres directs
de Quiloma. Le roi-dragon avait décidé d'accompagner Sstanch dans
son voyage.
Il avait soigné son entrée. Ayant
rejoint le groupe en volant et s'étant assuré de leur bonne
progression, il avait mis le cap sur la ville. Les guetteurs
l'avaient repéré à ce moment-là comme il débouchait au dernier
tournant de la vallée. Il avait entendu leur cri d'alerte. Il avait
laissé le temps aux hommes de se préparer en décrivant des ronds
autour de Tichcou. Quand Sstanch s'était présenté aux portes de
la ville, il avait atterri. Le dragon-homme rouge s'était stabilisé
au sol de deux coups d'ailes vigoureux et avait laissé la place à
l'homme-dragon son bâton de pouvoir à la main. Derrière lui
Sstanch pénétra sur l'esplanade à la tête de ses guerriers tout
de blanc vêtus.
À leur arrivée, Kaltrim s'était
avancé pour rendre hommage. Si son bras gauche était en écharpe,
son maintien était celui d'un prince-roi. Derrière lui se tenaient
trois groupes, au centre les flamintiens en tenue de parade, de part
et d'autre les soldats du fort avec à leur tête les commandants
respectifs. Kaltrim avait profité des quelques jours d'absence du
roi-dragon pour ordonner la ville à la nouvelle vassalité.
- Prince-roi, tu as bien agi. Je te
présente celui qui sera comme un compagnon pour toi.
Il fit signe à Sstanch d'avancer. Il
craignait cet instant. Si les deux hommes ne se plaisaient pas, des
difficultés en seraient la conséquence. Sstanch se présenta devant
le prince-roi et mettant le poing fermé sur la poitrine, il
s'inclina :
- Que ta gloire soit grande comme ton
combat fut grand !
Le roi-dragon vit Kaltrim plisser les
yeux comme s'il cherchait quelque chose dans sa mémoire.
- Qui t'a apprrris cccette
sssalutation ?
- J'ai combattu dans la plaine lors des
grandes guerres, répondit Sstanch, sous les ordres de ton père dans
les unités de mercenaires.
Un sourire éclaira le visage du
prince-roi.
- Ah ! Les Grrrandes Guerrrrrres !
Il était plus facccile alorrrs de prrrouver sssa vaillanccce.
Pendant la cérémonie qui suivit,
Sstanch ne quitta pas le prince-roi. À la fin de la journée, ils
étaient inséparables. Le roi-dragon souriait de les voir ainsi. Il
pensait surtout aux vivres. Le prince-roi avait tout prévu. Les
approvisionnements préparés pour la victoire lui étaient réservés
puisqu'il avait vaincu. Maintenant que l'hiver semblait s'éloigner,
des convois allaient arriver pour voir le roi-dragon et le lieu où
était enseveli le prince-roi, mort les armes à la main. Puisque la
vieille légende disait vrai, alors eux, les flamintiens avaient la
gloire à gagner en le suivant. Ils viendraient avec des vivres mais
aussi de l'or et des choses précieuses. Les caisses allaient se
remplir.
En attendant ce temps, les ordres
étaient donnés. D'ici quelques jours une caravane partirait chargée
de provisions. D'autres suivraient en fonction des besoins et selon
les ordres du roi-dragon ou de Sstanch.
Les jours qui suivirent furent
agréables. Les températures remontaient. Par endroit la neige
fondait. Plus haut dans la vallée, une fois le fort passé, le
froid était vif. Il y avait là comme une frontière entre
l'influence des dieux. Le roi-dragon marchait avec Sstanch. Il avait
décidé d'accompagner le premier convoi. Il était prévu qu'il
aille jusqu'au fort. Une fois là, il faudrait décider comment
poursuivre le voyage. Les hommes passeraient partout en portant peu.
Les clachs portaient beaucoup plus mais connaissaient des difficultés
pour progresser dans la montagne. Les tiburs seraient mieux adaptés.
La difficulté était de les faire venir. Sstanch et le roi-dragon en
discutaient quand :
- MON ROI ! MON ROI !
Le roi-dragon dirigea son regard vers
le cri. Prenant des risques insensés, un guerrier blanc dévalait la
pente raide de la vallée. Il admira sa maîtrise alors qu'il passait
les barres rocheuses. L'homme atteignit la hauteur du roi-dragon et
s'arrêta dans un nuage de neige.
Déchaussant et mettant un genou à
terre, il dit :
- Mon roi, ils sont là et c'est la
guerre !
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