jeudi 25 avril 2013

- Le chemin est pour moi, Monocarna. Me suivre est trop dangereux. J'ai appelé et vont venir ceux qui vont te protéger. 
La journée se passa tranquillement. Ils parlèrent du pays Blanc. Bien qu'élève de Mandihi, Monocarna ne connaissait pas la Blanche et l'entourage du Prince-majeur. Quand la lumière baissa, le roi-dragon dit :
- Ils sont là. Sois, sans crainte !
Mis mal à l'aise par ces dernières paroles, il jeta un coup d’œil dehors. Il sursauta. Il allait devoir faire confiance à ce qui lui avait toujours fait peur. Le roi-dragon était sorti à la rencontre du groupe de crammplacs poilus.
- Merci d'être venu, Maltmosfia. Je vois que tu as amené tes femelles. C'est une belle harde que tu as là.
Le crammplac redressa la tête en regardant le roi-dragon.
- Non, Monocarna est différent de l'être debout Kyll. Sa compréhension est plus intuitive. Si sa peur se tait, il sentira ce que tu lui transmets. Prends soin de lui et amène-le dans la vallée des grottes quand cela sera la moment.
Le roi-dragon se tourna vers Monocarna.
- La femelle dominante va être en charge de toi. C'est elle qui te transportera. Tu verras, leur fourrure est étonnamment douce et agréable.
- Mon inquiétude est grande, majesté. Depuis des saisons et des saisons, les crammplacs poilus sont nos ennemis.
- Oui, il faut que cela cesse, Monocarna. Ils sont aussi sujets du roi-dragon. Laisse ta peur de côté et tu prendras plaisir au voyage.
Ils se dirigèrent vers le fond de l'abri. Dans la nuit qui tombait, une faible luminescence bleue venait du tunnel qu'ils avaient découvert.
- Écoute et tu comprendras quand Maltmosfia t'invite à chevaucher. Alors accroche-toi à la fourrure du cou et profite du voyage. Ce temps arrivera quand j'aurais reçu mon nom.
Ayant dit cela, le roi-dragon se laissa glisser dans le tunnel.
- « Mon plaisir est grand,  sinueux roi-dragon du clan Louny ! »
L'ombre de l'ombre du dieu dragon l'entourait pendant qu'il descendait dans le noir, glissant sur la pierre recouverte de glace.
- « Tu as trouvé la vraie porte, celle des commencements ! »
Sa glissade se termina sans encombre dans une salle. Il se remit debout. La faible luminescence de l'ombre de l'ombre n'éclairait rien. Dans le noir, ses yeux d'or virent les entrelacs sur le mur. Il reconnut ceux de son bâton. Le maître-sorcier Kyll avait vraiment été bien inspiré. S'approchant de la paroi, il remarqua leur point de départ. Il posa le bout de son bâton dessus. Son esprit vacilla. Le temps devint fluctuant. Il vit, il sut.
Devant lui le Dieu Dragon entrait dans la grotte. Il tenait le feu et la glace et son souffle était vent. Dehors le monde tressaillait du combat des dieux Cotban et Sioultac. Le premier dragon prit naissance. Il était beau de tous les arcs en ciel qui habillait ses écailles. Il était fort du feu et de la glace que le Dieu Dragon avait sculptés. Il était grand comme le vent que le Dieu Dragon lui avait insufflé. Le Dieu Dragon se mit à rire aux éclats. Son œuvre était belle. De rire en rire, le dragon aux écailles multicolores éclata en milliers de dragons aux couleurs chatoyantes. Ils prirent possession de la terre pendant que Cotban et Sioultac se reposaient de leur combat. Ce furent des temps heureux. Le Dieu Dragon était adulé par ce flot multicolore de grands sauriens. Cotban qui avait beaucoup souffert dans son combat contre Sioultac jalousa ce dieu qui tirait sa puissance de ses adorateurs. Il fit des hommes qui prirent la belle couleur de ceux qui connaissent le soleil. Il les fit nombreux pour qu'ils lui rendent un culte puissant. Sioultac dans le lointain de ses terres froides vit s'avancer ses hordes de bipèdes. Il en conçut ressentiment et rage. Il cria sa colère dans un souffle glacé qui blackboula les dragons et congela les créatures de Cotban qui fuirent vers les terres chaudes. C'est alors que Wortra intervint. Il sauva les dragons en échange du feu qui ne s'éteint pas. Le Dieu Dragon affaibli par les blessures de ses adorateurs y consentit. C'est ainsi que naquirent les grandes grottes des rois-dragons. Ce furent des temps plus sombres repliés sur le petit royaume des grottes. Les blessures cicatrisèrent lentement. Et lentement remonta le nombre des dragons. Le Dieu Dragon pensa qu'il fallait des aides pour les dragons. Prenant exemple sur Cotban, il fit des hommes chez qui il mit l'amour des dragons. Contrairement aux dragons, les hommes ne peuvent vivre dans le monde des grottes. Il fallut quitter le monde rassurant des grottes pour les grands espaces du monde blanc. Sioultac avait lui aussi créé. C'est ainsi que de la confrontation entre Gowaï et hommes naquit le conflit.
Le roi-dragon progressait dans les grottes. Son bâton suivait les lignes. Lui suivait son bâton. Il voyait les temps anciens des premiers conflits entre  peuples. Il vit le Dieu Dragon choisir le clan Louny pour y susciter un champion qui aurait à cœur son Dieu. Il vit naître le premier des rois-dragons. Tracmal fut son surnom. Il ramena dans le droit chemin les hommes qui s'égaraient, unifia les clans et fonda la Blanche. Les dragons et les hommes vécurent des temps heureux.
Inexorablement le temps passa. Sioultac et Cotban devinrent des légendes. Le Dieu Dragon lui-même malgré ses adorateurs, s'en alla où s'en vont les dieux.
Les dragons qui vivaient en symbiose avec lui, perdirent leur énergie. Leur nombre diminua. Les rois-dragons se firent rare. Vint le temps des Princes-majeurs.
Si la ligne gravée était devenue ténue, elle n'avait pas disparu. De loin en loin naissait un roi-dragon qui renouvelait la puissance du Dieu Dragon.
Le roi-dragon avançait dans les grandes salles où avaient vécu les dragons aux couleurs chatoyantes. Il sentit qu'il était redevenu dragon lui-même, suivant de son œil d'or les sinuosités de la ligne du temps. Fine comme un cheveu, elle oscillait au gré des évènements. Son émotion devint intense quand il la vit porter fleurs et fruits, bourgeonner et se scinder pour s’entremêler. Elle dessinait son nom pour celui qui savait lire ses lignes. Telle une plante se jouant de la gravité, elle allait et venait décrivant les sinuosités de sa vie.
Alors il connut la joie de celui à qui est révélé son nom : Lyanne. Il était Lyanne du clan de Louny, dragon rouge porteur de l'espoir d'un Dieu et d'un peuple.

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