vendredi 15 mars 2013

Son retour en ville avait réjoui le cœur des habitants. Le roi-dragon s'était entretenu longuement avec Quiloma sur ce qu'il convenait de faire. Les gens de Tichcou avaient des vivres et allaient les partager. Pouvait-on leur faire suffisamment confiance ? Le roi-dragon ne le croyait pas. Il voulait un contrôle. Il avait proposé à Quiloma de prendre le commandement des deux villes. Ce dernier avait accepté mais avait refusé de descendre à Tichcou.
- Il n'est pas bon que l'ennemi d'hier commande aujourd'hui. Il serait préférable d'envoyer quelqu'un issu d'ici, avait-il déclaré.
L'idée avait plu au roi-dragon. Ils s'étaient arrêtés sur le nom de Sstanch qui avait montré sa valeur dans les évènements passés. C'est ainsi qu'une demi-phalange était partie vers Tichcou. Ce n'étaient que des guerriers du cru. Le détachement n'était composé que d'hommes nés dans la ville. Les guerriers blancs restaient sous les ordres directs de Quiloma. Le roi-dragon avait décidé d'accompagner Sstanch dans son voyage.
Il avait soigné son entrée. Ayant rejoint le groupe en volant et s'étant assuré de leur bonne progression, il avait mis le cap sur la ville. Les guetteurs l'avaient repéré à ce moment-là comme il débouchait au dernier tournant de la vallée. Il avait entendu leur cri d'alerte. Il avait laissé le temps aux hommes de se préparer en décrivant des ronds autour de Tichcou. Quand Sstanch s'était présenté aux portes de la ville, il avait atterri. Le dragon-homme rouge s'était stabilisé au sol de deux coups d'ailes vigoureux et avait laissé la place à l'homme-dragon son bâton de pouvoir à la main. Derrière lui Sstanch pénétra sur l'esplanade à la tête de ses guerriers tout de blanc vêtus.
À leur arrivée, Kaltrim s'était avancé pour rendre hommage. Si son bras gauche était en écharpe, son maintien était celui d'un prince-roi. Derrière lui se tenaient trois groupes, au centre les flamintiens en tenue de parade, de part et d'autre les soldats du fort avec à leur tête les commandants respectifs. Kaltrim avait profité des quelques jours d'absence du roi-dragon pour ordonner la ville à la nouvelle vassalité.
- Prince-roi, tu as bien agi. Je te présente celui qui sera comme un compagnon pour toi.
Il fit signe à Sstanch d'avancer. Il craignait cet instant. Si les deux hommes ne se plaisaient pas, des difficultés en seraient la conséquence. Sstanch se présenta devant le prince-roi et mettant le poing fermé sur la poitrine, il s'inclina :
- Que ta gloire soit grande comme ton combat fut grand !
Le roi-dragon vit Kaltrim plisser les yeux comme s'il cherchait quelque chose dans sa mémoire.
- Qui t'a apprrris cccette sssalutation ?
- J'ai combattu dans la plaine lors des grandes guerres, répondit Sstanch, sous les ordres de ton père dans les unités de mercenaires.
Un sourire éclaira le visage du prince-roi.
- Ah ! Les Grrrandes Guerrrrrres ! Il était plus facccile alorrrs de prrrouver sssa vaillanccce.
Pendant la cérémonie qui suivit, Sstanch ne quitta pas le prince-roi. À la fin de la journée, ils étaient inséparables. Le roi-dragon souriait de les voir ainsi. Il pensait surtout aux vivres. Le prince-roi avait tout prévu. Les approvisionnements préparés pour la victoire lui étaient réservés puisqu'il avait vaincu. Maintenant que l'hiver semblait s'éloigner, des convois allaient arriver pour voir le roi-dragon et le lieu où était enseveli le prince-roi, mort les armes à la main. Puisque la vieille légende disait vrai, alors eux, les flamintiens avaient la gloire à gagner en le suivant. Ils viendraient avec des vivres mais aussi de l'or et des choses précieuses. Les caisses allaient se remplir.
En attendant ce temps, les ordres étaient donnés. D'ici quelques jours une caravane partirait chargée de provisions. D'autres suivraient en fonction des besoins et selon les ordres du roi-dragon ou de Sstanch.
Les jours qui suivirent furent agréables. Les températures remontaient. Par endroit la neige fondait. Plus haut dans la vallée, une fois le fort passé, le froid était vif. Il y avait là comme une frontière entre l'influence des dieux. Le roi-dragon marchait avec Sstanch. Il avait décidé d'accompagner le premier convoi. Il était prévu qu'il aille jusqu'au fort. Une fois là, il faudrait décider comment poursuivre le voyage. Les hommes passeraient partout en portant peu. Les clachs portaient beaucoup plus mais connaissaient des difficultés pour progresser dans la montagne. Les tiburs seraient mieux adaptés. La difficulté était de les faire venir. Sstanch et le roi-dragon en discutaient quand :
- MON ROI ! MON ROI !
Le roi-dragon dirigea son regard vers le cri. Prenant des risques insensés, un guerrier blanc dévalait la pente raide de la vallée. Il admira sa maîtrise alors qu'il passait les barres rocheuses. L'homme atteignit la hauteur du roi-dragon et s'arrêta dans un nuage de neige.
Déchaussant et mettant un genou à terre, il dit :
- Mon roi, ils sont là et c'est la guerre !

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