vendredi 8 mars 2013

Sur le chemin du passage vers les grottes à Machpes, le Roi-dragon rencontra des guerriers blancs. Le konsyli le regarda. Il arrêta son groupe de jeunes recrues.
- Nous nous sommes déjà rencontrés.
Il avait dit cela sur le ton de l'évidence. Le Roi-dragon l'avait reconnu. Il s'agissait d'un plus jeune que lui qui avait commencé sa formation à Montaggone après lui.
- Oui, il y a bien des lunes, répondit-il.
- Je ne me souviens pas que tu aies participé aux combats. Un guerrier avec un marteau, cela se remarque.
- Tu as raison. J'étais sur d'autres combats.
- Bien éloignés, je ne t'ai jamais vu aux rapports.
- Très éloignés ! J'ai été envoyé pour m'occuper du dragon. Cela a pris beaucoup de temps.
Le konsyli se renfrogna.
- Le dragon a toujours été proche, dans sa vallée. J'ai participé à plusieurs missions, dont la dernière, il y a quelques jours pour détruire un détachement de ces chasseurs en armure de métal. Je ne t'ai pas vu non plus là-bas.
Il fit un geste ordre de se préparer au combat. Le Roi-dragon continua comme s'il ne remarquait rien.
- Quelques jours, dis-tu ? Le temps est passé plus vite que je ne le pensais.
- Il serait bien que tu ailles te présenter au Prince pour faire ton rapport.
- Oui, le Prince Quiloma m'espère depuis longtemps. M'accompagnerez-vous ?
Il sentit le soulagement du konsyli qui devait chercher comment le ramener sans combat.
- L'idée me semble bonne, dit ce dernier.
Il donna des ordres à sa main de guerriers qui fit demi-tour.
« Bien disciplinés ! Le prince ne perd pas la main ! » pensa le roi-dragon. Il vit les gestes ordres donnés. Au fur et à mesure qu'ils avançaient dans les grottes, il les vit sortir qui une dague, qui une épée. Le roi-dragon souriait. La situation l'amusait beaucoup. Quand ils arrivèrent un peu plus loin dans les sombres couloirs, un brusque courant d'air fit s'éteindre la lumière que portait le konsyli. Le roi-dragon l'entendit jurer. L'obscurité était complète.
- Tiembo, prends le pot à feu et rallume la lampe.
Le roi-dragon regardait le visage anxieux de ces hommes et la maladresse du dénommé Tiembo qui n'arrivait pas à faire ce qu'on lui demandait. Le konsyli avait tiré son épée et tendait l'oreille, inquiet de la possible fuite de son prisonnier.
- Un peu d'aide peut-être ? dit le roi-dragon en touchant la lampe du bout de son bâton. La lumière revint plus vive, plus claire. Le konsyli regarda le roi-dragon en ouvrant des grands yeux.
- Qui es-tu ? demanda-t-il en prenant du recul.
- Quelqu'un qui revient. Mais ne faisons pas attendre le prince, allons !
Les hommes obéirent sans discuter. Ils traversèrent les grottes à machpes. Ceux qu'ils rencontraient leur jetaient un simple regard et retournaient à leur ouvrage. En cette saison, les machpes étaient indispensables. Quand ils arrivèrent à la lumière sous le porche, Tiembo souffla sur la flamme. Elle refusa de s’éteindre même après plusieurs essais.
- Évite de la toucher, dit le roi-dragon quand il vit que Tiembo voulait étouffer la flamme.
Il fit un geste et la lampe devint obscure. Un charc perché non loin, décolla en criant.
- Allons, dit encore le roi-dragon, on dirait que vous voulez prendre racine.
Le konsyli sembla se réveiller. Il donna avec retard, des ordres pour aller vers Montaggone. Le roi-dragon avait déjà pris le chemin vers la citadelle. Les guerriers lui coururent après.
La ville avait connu des combats. Le roi-dragon avait vu en bas des maisons détruites par le feu. Il espérait que Sabda et sa mère étaient sauves. Quand il arriva devant la porte de Montaggone, les sentinelles se mirent en alerte. Le konsyli s'approcha d'elles en courant. Il leur parla à voix basse. L'une d'elles se tourna vers le groupe et dit :
- Attendez-là !
L'autre était entrée dans la citadelle. Il ne fallut que quelques instants à plusieurs mains de guerriers pour arriver équipées et prêtes à en découdre. Certains avaient pris position sur les remparts. Le roi-dragon eut un sourire, certains qui avaient l'arc à la main et une flèche encochée, baissèrent leur arme en se regardant. Il lut sur leurs lèvres : « On dirait... ».
Qunienka sortit à ce moment-là. Il regarda la situation. Son regard hésita un instant sur le roi-dragon. Il y eut comme un voile, puis il se reprit :
- Que tout le monde reprenne son poste ! Vous, dit-il en désignant le groupe qui accompagnait le roi-dragon, et toi, venez !
Il fit demi-tour. Le roi-dragon entra à son tour suivi par la main d'hommes. Ils se dirigèrent vers l'habitation du prince. Alors qu'ils approchaient, Quiloma sortit. Il donnait des ordres à quelqu'un qui s'éloignait vers la grande salle. Il reporta alors son attention vers ceux qui arrivaient.
Brutalement, les présents le virent arracher de sa ceinture l'étui contenant l'insigne de sa fonction et le jeter à terre. Quiloma regarda le morceau de bois qui rougeoyait, puis le roi-dragon, puis le bâton à terre. A l'étonnement de tous, il mit genou à terre, le poing droit fermé sur le cœur en courbant la tête.
Qunienka fut le premier à comprendre et fit de même. Puis le mouvement s'amplifia. Tous les guerriers venus du pays blanc mirent genou à terre. Les autres les imitèrent sans comprendre. Quiloma releva la tête :
- Graph ta cron ! Graph ta cron Mjatsa ! (Gloire au Dieu-dragon ! Gloire au fils du Dieu-dragon!).
Qunienka et les guerriers blancs reprirent en chœur. Seul le roi-dragon était debout appuyé sur son bâton.
- Quiloma tra...( Prince Quiloma tu m'as bien servi sans me connaître. Ta fidélité est un bien précieux que je ne gaspillerai pas. Tes nombreuses cicatrices et les blessures que tu portes encore sont les meilleurs des témoins de l'attachement à ton roi. Maintenant il est temps de reconstruire ce que d'autres ont détruit.)
S'approchant de Quiloma, il le toucha de son bâton. Ce dernier sentit la force affluer en lui. Ces plaies qui cicatrisaient mal se fermèrent.
- Rtem...(Tu as géré cette ville et cette région. Tu as bien fait. Tu l'as bien fait. Tu as choisi de m'éloigner quand ce fut nécessaire sans savoir si c'était un bon choix. La fidélité au Dieu Dragon est forte en toi. Tu seras celui sur qui je m'appuierai. Ton second Qunienka a suivi ton exemple, il mérite d'être appelé prince...)
C'est alors qu'on entendit une voix :
- Et il est où le dragon ?
Le roi-dragon avait beaucoup ri en entendant Sabda poser sa question.
- Il est moi ! avait-il répondu.
Elle l'avait alors regardé avec le même regard que la Solvette.
- La puissance est en toi. Je souhaite qu'elle ne corrompe pas ton cœur.
- C'est un cœur de dragon, lui dit-il. Les charcs t'ont prévenue. Ils ont bien fait. Les charcs vont répandre la nouvelle. C'est une bonne et une mauvaise chose. Tout dépendra des oreilles qui écouteront.
Lui tendant la main, il ajouta :
- Si la force de la région est dans les mains du prince, le cœur de cette région, c'est toi et celles qui sont comme toi.
- Et tu fais quoi des sorciers ? avait-elle répondu mutine.
- Ils ont leur rôle dans l'équilibre de ce monde.
- Quel est ton nom ?
- Mon nom est un secret qui m'est réservé depuis la nuit des temps. Il est bon pour l'instant qu'il ne soit pas connu.
Le roi-dragon tenait la main de Sabda.
- Fêtons mon arrivée, dit-il.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire