Aux premières lueurs du jour, Kalgar s'habilla rapidement. Il était resté dans la maison commune avec sa femme. Lorsqu'il ouvrit la porte, il grimaça. La neige s'était accumulée. Il avait devant lui un mur de neige qui lui arrivait à mi-cuisse. En cette saison, ce n'était pas rare. La vie n'avait pas encore repris dans la ville. Il soupira, retourna chercher la pelle à neige et entreprit de se dégager un chemin. Il lui fallut du temps pour arriver jusqu'à la petite place où se dressait la tour de guet.
- Ah, Kalgar! C'est bien que tu m'aies dégagé la route.
Se retournant, Kalgar vit arriver Filt avec sa pelle à neige sur l'épaule.
- Sstanch m'a demandé de faire le guet ce matin. Cette histoire d'étrangers ne lui plaît pas.
- Monte et dis-moi si c'est libre dehors.
- J'ai pensé que tu serais là. J'ai amené mon arc.
Les deux hommes se séparèrent. Chacun faisant un chemin, qui vers la tour, qui vers la porte.
Kalgar arrivait à la porte quand Filt escaladait l'échelle.
- Knam ! Il y a toute une meute !
Kalgar se retourna en entendant le cri de Filt. Il fit tomber la lourde barre de bois qui barrait la porte.
- Attends Kalgar, il y a au moins vingt loups noirs.
- Qu'est-ce qu'ils font?
- C'est ça qui est étrange, ils sont couchés près de la pierre qui bouge.
- Tu vois la pierre qui bouge?
- Ben oui!
- Avec toute cette neige tu la vois?
- Comme je te vois!
Kalgar se précipita sur la porte. Bandant ses muscles, il tira pour entrebâiller le battant. Elle grinça comme si elle protestait pour se mettre en mouvement. Filt banda son arc, encocha une flèche et se prépara à tirer.
- N'ouvre pas, Kalgar! Les loups pourraient rentrer!
Celui-ci ne l'écoutait pas. Il força encore plus. Il eut bientôt assez de place pour se glisser dehors.
Certains loups se levèrent, dressant les oreilles. Une grande femelle monta sur la pierre qui se mit à osciller doucement. Elle regarda vers Kalgar puis tourna la tête vers l'endroit où avaient été déposés les enfants. Filt aurait voulu l'abattre mais il savait qu'à cette distance, il manquait de précision. Il préféra garder sa flèche pour le moment où ils allaient attaquer Kalgar, espérant que quelqu'un viendrait fermer la porte avant que les loups ne rentrent dans la ville.
La louve leva la tête et poussa un long hululement. A son cri, les autres loups se mirent sur leurs pattes. Elle descendit tranquillement de la pierre qui bouge pour se diriger vers la forêt, derrière elle en file indienne, les grands loups noirs lui emboîtèrent le pas. Kalgar se démenait comme un sqach sous le sort du sorcier. De sa pelle, il traçait un chemin. Il n'était pas arrivé à la moitié que les loups avaient atteint la forêt. La louve s'arrêta alors. Elle regarda l'homme qui allait vers la pierre.
Filt tenait toujours son arc bandé. Lentement il laissa aller son bras vers l'avant. Il n'avait jamais vu cela. Une meute de loups ne pas attaquer une proie facile pour eux. Ce n'est pas avec deux bébés qu'ils avaient pu être rassasiés.
Kalgar ne voyait rien de ce que faisaient les loups. Il voulait savoir. La Solvette lui avait dit que ces enfants étaient pleins d'énergie vitale, surtout le garçon.
Plus il approchait de la pierre qui bouge et moins il y avait de neige. Il se demandait ce qu'il allait trouver. Cette meute de loups n'avait pas dû laisser grand chose. Il donna un coup de pelle, encore un, encore un. Le dernier n'avait pas ramené grand chose. Il regarda devant lui. La neige avait fondu. Il lâcha sa pelle et courut vers la pierre qui bouge. Il s'arrêta brusquement.
La louve hurla un cri bref et s'enfonça dans la forêt.
Kalgar n'en croyait pas ses yeux. Sous la pierre qui bouge, sans l'ombre d'un flocon de neige, les deux enfants dormaient dans la douce chaleur du lieu. La douce chaleur du lieu? Ce n'était pas possible. Entre la tempête et la neige, il devait geler à pierre fendre. Il regarda autour de lui. Il avança la main. La pierre qui bouge était chaude. Les esprits avaient décidé. Il prit les deux enfants et se rua vers la maison commune.
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