Sstanch avait été tout de suite
rendre compte à Chan dans la maison commune. Natckin était là
aussi. Il avait essayé de parler avec Kyll mais celui-ci était
probablement dans sa cellule de méditation et personne n'osait le
déranger pendant qu'il méditait. Natckin était mal à l'aise
d'avoir fait le rite sans en référer à Kyll. Personne au temple
n'avait fait de remarque, même pas ce vieux rabougri de Tonlen. On ne
savait jamais ce qu'il pensait. Il présentait à tous, le même
visage imperturbable quoi qu'il arrive. Il avait assuré le même
service pour Natckin que pour Kyll ou pour le vieux maître sorcier.
Natckin pensait qu'il ne risquait rien de lui. Est-ce qu'il pourrait
aller encore plus loin dans cette voie de concurrence à Kyll? Il
remuait ces pensées pendant que Sstanch rapportait ce qu'il avait vu
avec les extérieurs. Il impressionna beaucoup l'auditoire en
racontant que le prince étranger avait été affronter seul les
loups noirs et qu'il avait réussi à les mettre en fuite.
- Qu'est-ce qu'ils font maintenant? Ils
repartent?
- Si j'ai bien compris l'homme des
forêts qui sert d'interprète, ils vont faire un rite pour l'anneau
qui est resté.
- Quel anneau?
- L'étranger qui est mort avait à la
main droite un anneau sur le majeur. Celui-ci semble important ou
sacré. Le prince extérieur n'a pas voulu y toucher comme cela. Il a
pris les autres affaires mais pas l'anneau qui est resté sur la
main.
- Ils ne s'en vont pas ?
- Pas sans l’anneau.
- Je n’aime pas cela, dit Rinca.
Chan reprit la parole :
- Ils ont ou ils vont avoir ce qu’ils
veulent. Ils repartiront après. Qu’en pense notre premier
sorcier ?
Natckin qui sortait de ses pensées,
prit la pose et déclara d’une voix grave et docte :
- Les esprits ont parlé. Nous leurs
avons obéi. Les oracles semblent bons. Je ferai un nouveau rite de
divination tout à l’heure pour en savoir plus.
- Où est le maître sorcier ?
Natckin regarda Rinca. Le visage de
l’ancien ne montrait pas d’animosité. Le vieux maître sorcier
n’avait pas habitué le conseil à se faire remplacer.
- Le maître sorcier médite. Il est
très souvent visité par les esprits. Cela le fatigue beaucoup. Il
m’a demandé de le représenter. Il …
La porte s’ouvrit à toute volée.
Kalgar entra. Il semblait dans tous ses états. Chan se leva pour le
remettre en place.
- Et bien Kalgar ! Qu’est-ce…
- Ils ont créé du feu !
La nouvelle les laissa sans voix, puis
tout le monde se mit à parler en même temps. Chan eut beaucoup de
mal à faire revenir le silence. Quand l’assistance se tut enfin,
il interrogea Kalgar. Celui-ci raconta qu’à son retour, après
avoir raconté à ceux qui attendaient à la porte des hautes terres
ce qu'il s’était passé, il était monté sur la tour pour aider à
la surveillance. La visibilité ne portait pas très loin avec cette
neige collante qui tombait. Il voyait de l’agitation dans le camp
derrière le rempart de blocs de neige. Il expliquait à Filt comment
était organisé le campement des extérieurs. Il lui avait fait la
remarque, qu’il n’avait pas vu de feu chez eux. Filt s’était
interrogé sur leur manière de se nourrir pendant ces longues
courses dans les montagnes. Bien sûr, ils avaient leurs sacs en
bandoulière. Les provisions devaient y être gelées. Manger froid
et sucer de la neige n’étaient pas facile. Filt n’enviait pas
leur sort. Les armes étaient belles, l’uniforme plus attirant que
le sien mais les conditions de vie n’avaient pas la douceur de ce
qu’il vivait. Le ciel se dégagea un peu. Toujours sur leur tour,
ils avaient vu un groupe se former près de la pierre qui bouge. Ils
avaient amené du bois. Kalgar et Filt pensèrent à un feu mais
repoussèrent l’idée. Kalgar n’avait vu aucun pot à feu chez
eux. Le prince s’était approché du fagot qui avait été déposé
à l’abri du vent près de la pierre qui bouge. Il l’avait vu
sortir un court bâton rouge. Il l’éleva au-dessus de sa tête,
puis sembla le casser en deux. Il en sortit quelque chose de noir.
Filt pensa à des cailloux, Kalgar évoqua le charbon de bois. Le
prince des extérieurs s’accroupit et tapant l’une contre l’autre
ses mains, il fit jaillir des étincelles. Bientôt le feu prit
devant leurs yeux étonnés. Ils n’avaient jamais vu cela. En
ville, tout le monde gardait précieusement un pot à feu. Son
extinction était un malheur et un très mauvais présage. Quand le
feu fuma bien, le prince se releva et rangea dans le bâton ce qu’il
en avait sorti. Kalgar n’avait pas attendu de voir la cérémonie
pour descendre prévenir le conseil des anciens.
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