Chan ne comprenait rien. Les guerriers
de la mort et leur prince étaient rentrés en nombre dans la ville.
Sans mot, ni demande, ils entraient dans toutes les maisons. Ils
avaient commencé par la maison commune. Le conseil encore une fois
réuni, essayait de trouver une ligne de conduite. Les débats furent
interrompus par l'irruption de dix soldats qui se répartirent dans
la maison. Leur prince entra examina les lieux un moment et ressortit
sans un mot. Rinca éructait ses envies de meurtres, rejoint en cela
par d'autres. Alors qu'il se levait brusquement pour hurler sa haine,
comme un seul homme, les dix guerriers avaient tiré leurs armes du
fourreau. Sstanch avait crié :
- Que tout le monde se calme ou ça va
être un massacre !
La voix de la raison et un guerrier de
la mort à moins d'une longueur d'épée de lui, l'avaient calmé.
Quand ils étaient sortis, tout le conseil leur avait emboîté le
pas. Leur chef, ce Quiloma, visitait toutes les habitations.
- Que cherche-t-il ?
- Je ne sais pas, et l'homme des bois
n'est pas là pour traduire.
Leurs pas les portaient vers le bas de
la ville. Andrysio s'opposa à leur entrée dans sa maison. Il n'y
eut même pas de combat. L'épée lui traversa le corps avant qu'il
ait fini sa phrase de protestation. Ceux de sa maison qui essayèrent
de résister subirent le même sort. Quand le prince pénétra dans
la maison, il évita de peu le couteau de l'épouse d'Andrysio, elle
non. La dague du prince lui transperça le cœur. Quand ils
ressortirent de la maison, il n'y avait plus âme qui vive dedans. Le
prince en sortant, fit un geste à ses hommes. Immédiatement les
guerriers de la mort prirent position aux points stratégiques de la
ville avant qu'une opposition organisée puisse naître. Organisés
trois par trois dont un archer prêt à tirer, ils découragèrent
ceux qui auraient voulu agir. La peur remplaça la curiosité.
Courant devant les extérieurs, Sstanch et ses hommes firent fuir les
habitants.
Chan était assis sur un banc la tête
entre les mains, prostré, répétant :
- C'est pas possible ! C'est pas
possible !
La nouvelle se répandit comme une
rivière qui déborde. Sans la neige qui s'annonçait, ils auraient
fui. Partir c'était mourir à coup sûr, rester laissait une petite
chance. La question qui hanta la population de la ville fut : "comment
ne pas subir le sort d'Andrysio ?"
Pendant ce temps, Quiloma arrivait en
bas de la ville, près de la rivière. Il trouva la Solvette sur le
seuil, debout les mains sur les hanches, la tête droite.
Quiloma s'arrêta devant elle,
impressionné par le regard de feu qui couvait dans les yeux de la
Solvette.
- Spso...( Femme, écarte-toi, que je
fasse ce que je dois faire!).
- Non, tu ne passeras pas. Tu n'es pas
le bienvenu.
Quiloma sursauta. Personne n'avait eu
un tel ton devant lui depuis bien longtemps.
- Ncin...(Tu ne crains pas la mort que
tu t'opposes à moi ?).
La Solvette fit un geste. La neige
accumulée sur le toit, s'effondra, ensevelissant cinq hommes à sa
droite.
- Je ne te crains pas.
Quiloma regarda ses hommes, regarda la
Solvette. Sa dague jaillit comme un dard. Son geste ne fut jamais
fini, un grand Charc noir lui avait saisi la main dans ses serres.
D'autres décollèrent des toits environnant pour venir tourner
au-dessus de leurs têtes. Quiloma lâcha la dague et se recula.
Cette femme commandait aux Charcs, ces oiseaux maudits que tout
guerrier redoutait. Sur les champs de bataille ce sont eux qui
achevaient les blessés.
Quiloma se détourna brusquement,
ramassa sa dague et donna l'orde de repli. Une escouade resta à
dégager les hommes ensevelis mais tous partirent le plus vite
possible après.
Ce fut une autre rumeur qui se mit à
courir en ville. La Solvette avait tenu tête et était encore en
vie. A la peur se mêla la jalousie de voir qu'elle réussissait là
où les autres échouaient.
Les guerriers de la mort remontèrent
par la rue du temple. Ils continuèrent leur visite systématique.
Personne ne s'opposait, puisque les maisons étaient vides de leurs
habitants. C'est dans cette rue que Quiloma se retrouva face à
Natckin et à Tonlen. Avant d'avoir pu dire ou faire quelque chose,
les deux sorciers furent entourés par une escouade. Quiloma leur fit
signe d'avancer vers le temple qu'ils venaient de quitter. Ici non
plus, personne ne s'opposa aux guerriers. Quiloma visita tous les
bâtiments qui composaient le temple. Il sourit. Il avait trouvé où
allait loger Jorohery et sa suite.
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